Une île battue par les vents et les flots, on ne peut plus se permettre d’en douter, elle nous a accueilli ce jeudi 17 mai avec des senteurs de garrigue à 10 milles des côtes, le premier réflexe est d’être enchanté , le deuxième dans la seconde qui suit c’est de se mettre à son poste de combat, je vous laisse le soin de deviner pourquoi le temps de vous narrer le début de cette journée de navigation.
Départ 6h30 de la pointe sud-est de Tinos, vent prévu sud-ouest force 4, puis sud force 5 à 6, du tout bon pour parcourir les 75 milles qui nous séparent de Skyros, départ à ne pas manquer puisque dans la nuit qui suit il est prévu du Nord et pour plusieurs jours. Les prévisions étant comme il se doit fausses, nous aurons 3 à 5 nœuds de vent pendant trois heures, nous maintenons péniblement une vitesse à 4 nœuds en doux régime pour ne pas griller notre réserve en cas de route 100% moteur. Puis le vent fini par s’établir mais à 1/2 milles de notre route, nous décidons d’aller le chercher, évidemment en attendant nous avons la mer formée, un régal, grrrrr. Sur les fichiers météo, nous avions bien observé que notre route pouvait être à la frontière.
Nous pouvons ainsi établir le spi et filer à 3.5/5 nœuds, comment ça on se traine ?!? Attend ! Une heure après 6/7,5 pour 10/14 de vent, voilà c’est mieux non ! Jusqu’à 25 nœuds où on doit affaler. Je te passe les détails de la suite, plus de vent, un coup moteur, allez zou on remet le spi, ahhh flute ! On réaffale, la routine quoi, la mer de plus en plus formée sans le vent adéquat, bondiou ! Il est où ?
En milieu d’après-midi pour casser notre train-train, un nuage noir se forme au dessus de notre objectif, je contrôle, il n’est pas prévu d’orage, ça compense le nombre de fois où le mot thunderstorm apparait sur le navtex sans que rien ne nous tombe dessus.
Observation, le coquin a l’air de vouloir faire route de rencontre, nous on a toujours du vent de Sud, mais comme il faiblit, hein tu commences à comprendre ! Tiens il remonte, pour le coup Ivan n’est pas chaud pour remettre le spi pourtant on a une moyenne à remonter pour arriver au port avant la nuit.
Réaction, je vais chercher bottes et cirés pour les installer dans la nacelle.
Anticipation, la mer devient chaotique, houle sud et nord, chute du vent, le grand confort quoi, spi rangé.
Action, le nuage s’approche, vent d’ouest qui monte, bottes et ciré enfilés et il est temps de prendre un ris, ahh tiens ! Un second et génois réduit. Ca monte et ça mouille, paquet de mer et pluie, Paseo lui, biche, ça file, holà Bijou ! 9, 10, 11. Ivan dans son habit rouge, les jambes bien campées dans le cockpit, les yeux sur les instruments ou le nez en l’air, la main sur l’écoute, et parfois il barre, le pilote a du mal à réagir. A ce rythme on devrait prendre position au port assez tôt. Et puis ça se calme, la mer non ; coup de tonnerre, chaine installée au pied du mât à tremper dans l’eau. Le vent faiblit, ça va être joyeux de faire du moteur !
Consolation, les soudaines senteurs de garrigue en plus de nous plaire nous indique que finalement ça ne va pas être long, mais gros doute, je vérifie la distance qu’il nous reste à couvrir, 10 milles, 10 MILLES de la terre et la garrigue nous taquine le nez tu piges là ? Nous oui, un vent très fort arrive et dans le pif, va falloir tirer des bords. Le temps de réaliser, de réduire encore le génois, de tout border à fond et c’est là. Force 7/8, on était venu pour ça !
Histoire de raccourcir les réjouissances nous décidons de mouiller dans une baie au sud de l’île, de toute façon rien n’est sûr d’avoir une place au port et un amarrage serait sportif. A 19h00 nous sommes à l’abri, le premier réflexe c’est de se faire une soupe, la pluie finit par se calmer, mais reprendra le lendemain matin, nous attendons une accalmie
pour rejoindre le port de Linaria dans l’après midi. L’accueil nous impressionne, les quais ont été rénovés et aménagés, le responsable nous indique les commodités et nous présente une plaquette, eau, électricité, et internet gratuit, ou plutôt inclus dans la modique taxe portuaire. Même les arrivants par ferry débarquent sur une zone digne de présentation, bon nombre de ports publics des mers grecques pourraient en prendre exemple, la plaquette en option, ceci dit on a cru comprendre que c’était le regroupement de commerçants qui gérait cela, la gestion je veux bien, le financement j’en doute. Car en fait les commerces se résument à peu, et il faudra que l’on loue une voiture pour aller à la chora (ville perchée) à 10 km.
L’endroit est plaisant, pas excessivement encombrés de tavernas. Si il y a bien une chose qui nous agace c’est d’être racolés, encore pire que l’on nous fasse la tronche parce que l’on décide de faire un tour avant de fixer notre choix. Du coup on se décide pour un établissement plus modeste et familial où l’accueil est sincèrement attentionné, sous une terrasse heureusement couverte car il se remet à pleuvoir. Une belle trombe encore le lendemain matin, l’eau chargé de terre descend des collines, l’eau du port est marron, perversité du tout béton, dans l’aménagement il n’ont pas prévu des îlots de terre pour absorber l’eau.
Le soleil de retour, il est temps de tout rincer et sécher et une promenade s’impose.
Dimanche jour du Seigneur, pour être sûr que tout le monde en profite il cause dans le haut-parleur et arrose la baie de sa voix dissonante. Jour de lessive pour moi, c’est une tâche que j’aime assez, fantasmant sur un lavoir avec l’eau chantante.
Le lendemain, mission, trouver le poney endémique de l’île faisant l’objet d’une sauvegarde drastique, mais vu le nombre incroyable de chèvres on peut supposer que sa survie tient à pas grand chose, nous explorons la partie sud-est de l’île, nous trouvons des traces sur un haut plateau sur lequel est emménagé un point d’eau. c’est en redescendant que nous en trouvons un au bout d’une longe dans un pré. Il y a bien des années, il était utilisé pour le battage des céréales, demi-sauvage, il était relâché ensuite.
Il est tout fou, film
Le lendemain matin, nous explorons la partie nord-ouest, plus boisée, quoique certaine partie ont subi les outrages d’un feu il y a quelques années, on découvre les anciennes carrières de marbres, puis sur l’autre versant du massif la partie cultivée. Toute l’île est égayée de lauriers roses au maximum de leur floraison.
Nous finissons notre tour par la visite de la Chora haut perchée au Nord-Est, à l’ambiance cycladique, les rues sont si étroites que le cheval est encore utilisé pour le transport.
Skyros la belle désirée, on t’aime bien tu sais, mais nous devons poursuivre notre route, cap au Nord-Ouest !
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